EN TOURNÉE – SAISON 2020-2021
Ce dialogue, qui est presque un roman, Diderot l’écrit au sommet de son art, à près de soixante ans, et le revoit encore dix ans plus tard.
Il met aux prises deux personnages seulement, « Moi », et le Neveu. Ce personnage se dédouble sans cesse : qu’est-ce qu’un homme qui prétend ne pas avoir de conscience, d’unité, mais qui a en même temps une sensibilité esthétique, celle d’un musicien averti ?
Diderot mêle la grosse plaisanterie, les motifs et les sujets les plus divers, la lutte contre les adversaires des philosophes, dans cette mise en scène d’une conversation sans fin. Le neveu pose des questions importantes, et soudain, pour notre amusement, l’argumentation déraille. « Moi » est fasciné par ce bouffon sublime. Ainsi va cet enchaînement de numéros, de pantomimes, cette fausse pièce, ce faux roman, où l’auteur a mis, sous une allure burlesque, toute sa vie, tout son coeur et tout son esprit.
Quatrième de couverture de l’édition Folio Classique
Création en Mai 2020 à Versailles et Antibes
« A voir sur scène au Centre Culturel d’Uccle le mardi 9 juin 2020 à 20h15 »
Genre : Récit philosophique, Théâtre
Auteur : Denis Diderot
Distribution : Pierre Arditi et Bruno Abraham-Kremer
Production : L’Entêtement Amoureux, Compagnie Didier Bezace
Co-Production :
Mise en scène : Didier Bezace
Accessoires : ScénographieJean Haas
LumièresLéo Thévenon
CostumesCidalia da Costa
MaquillagesCécile Kretschmar
Adaptation théâtraleDidier Bezace
SonPierre Bodeux
Dramaturgie et musiqueLaurent Caillon
Saisons
2019-2020
En savoir plus
Lu dans la presse
Lire les commentaires
Dans ce dialogue inventé entre lui-même et le ténébreux Neveu, Diderot cherche à déchiffrer une énigme, celle d’une intelligence qui a renoncé à la vertu ; devant lui, le Neveu étale avec cynisme et faux détachement les turpitudes de sa vie.
Est-ce une provocation ? ou bien veut-il confesser à cet interlocuteur prestigieux le poids de son amertume vis à vis de lui-même ?
L’humour le protège de ses blessures, la conversation va bon train, elle est débridée, saute avec une apparente insouciance du coq à l’âne. Diderot, en adversaire convaincu, se bat pour des valeurs auxquelles il croit, sous le regard impitoyable d’un vaurien cultivé.
L’un est le miroir inversé de l’autre ; dédoublement ? peut-être… le philosophe est fasciné par un abîme moral qu’il entrevoit et dont il se défend, le Neveu ne peut s’empêcher de rêver un autre destin à travers celui de son contradicteur. Tous deux s’observent et se découvrent.
Les deux hommes ont existé, Diderot, pilier de l’Encyclopédie, théoricien d’un nouveau théâtre, auteur du célèbre Paradoxe, Jean-François Rameau, obscur neveu du prestigieux Jean-Philippe, piètre compositeur, violoniste, maître de musique et pique assiette, condamné par sa famille pour mauvaise conduite et incarcéré en 1769 à l’hospice des Bons-Fils d’Armentières où il mourra en 1777 sans avoir recouvré sa liberté.
Les deux hommes se sont sans doute croisés au cours de rencontres mondaines mais ne se sont jamais fréquentés, la conversation est fictive, les vraies personnes s’effacent derrière leurs personnages, LUI et MOI, héros d’un théâtre intérieur propre à l’auteur.
Ce n’est pas une conversation philosophique pour le seul plaisir de la dialectique, c’est un enjeu existentiel entre deux êtres qui se dévoilent.
Propos de bistrot ? Pourquoi pas si l’on accepte de rapprocher le Café de la Régence, lieu à la fois mondain et marginal situé dans le nouveau quartier du Palais Royal, d’un zinc ordinaire, déplaçant la conversation pour s’éloigner d’un exercice de style littéraire académique ; elle pourrait avoir lieu au comptoir d’une quelconque brasserie…
Diderot nous indique dans ses notes que le lieu, pourtant réel, tient d’une abstraction ; seul comptent les personnages qu’on voit et qu’on entend, leurs propos nous renvoient à nos propres et intimes contradictions.
Didier Bezace – metteur en scène, le 7 février 2019